LETTRE XXXIX
Béthanie,
quarante jours après la résurrection.
Mon cher père,
Avec une émotion qui me prive presque de pouvoir tenir ma plume et avec des doigts tremblants qui rendent les mots que j’écris presque illisibles, je suis assise pour te faire connaître l’extraordinaire événement qui marquera ce jour dans tout le temps futur comme le plus digne d’être noté parmi les hommes.
Dans ma dernière lettre, je t’ai informé que Jésus, après sa merveilleuse résurrection, qui fut connue de tous les hommes par des preuves infaillibles, rassembla une fois de plus ses disciples étonnés et adorant autour de Lui et leur enseigna avec plus que la sagesse et l’éloquence mortelles, les grandes vérités appartenant à son royaume qui, leur dit-Il alors, s’étendra à travers le monde entier.
Le quarantième jour, mon cher père, très tôt le matin, Il quitta la maison de Marie et Lazare, où Il fut assis avec nous toute la nuit (car personne parmi nous ne pensa au sommeil pendant qu’Il parlait de sa voix céleste) nous parlant de la gloire du ciel, et de l’excellence du cœur et de la pureté de vie requises de tous ceux qui y entreraient.
“Seigneur” dit Marthe, comme Il s’en allait “où vas-tu ?”
“Viens et vois” répondit-Il “où je vais, vous le saurez et la voie vous le saurez ; car où je suis vous serez aussi et tous ceux qui croient en moi.”
“Seigneur” dit Marie, s’agenouillant à ses pieds “reviens à midi et reste avec nous pendant la chaleur du jour.”
“Marie” dit Jésus posant doucement sa main sur son front “je vais à la maison de mon Père. Là, tu demeureras un jour avec moi dans des demeures qui ne sont pas faites par des mains. Suis-moi maintenant et tu en connaîtras le chemin ! C’est à travers la tentation que j’y ai d’abord marché, à travers la souffrance, à travers la mort et à travers la résurrection de la mort. De la même manière aussi, toi et tout celui qui m’aime devez me suivre. A mes amis, la porte de la tombe ouvre dans le monde de la vie éternelle.
Parlant ainsi, Il s’avança lentement vers la colline de Béthanie, non loin de l’endroit où Lazare fut enterré. Il fut suivi, non seulement par Marie, Marthe, Lazare et Jean, ma cousine Marie et moi-même, chacun de nous s’attendant, de ses paroles et manière, à quelque nouveau et grand événement devant se produire, mais par tous les disciples, qui L’avaient aussitôt rejoint près du cimetière au pied de la colline. Il y avait au moins cinq cents personnes en tout, se déplaçant avec Lui avant qu’Il n’atteigne le flanc vert de la colline au delà du village. Car tous Le suivirent, s’attendant à entendre de plus glorieuses révélations de ses lèvres sur la vie au delà de celle-ci.
“Il va à la colline pour prier” dit un de ses disciples.
“Non” dit Pierre “depuis sa résurrection, Il ne prie plus comme avant. Il n’a pas besoin de prière pour Lui-même, Lui qui a conquis le péché, Satan, la mort, la tombe et le monde !”
“Il va nous montrer quelque puissant miracle, de l’expression de puissance et majesté dans son aspect.” me dit Thomas, regardant son Seigneur avec crainte et respect ; car chaque moment, alors qu’Il gravissait la colline, son expression devenait plus glorieuse s’une certaine majesté divine, et brillait comme la face de Moïse, descendant du Mont Sinaï. Nous étions tous accrochés derrière avec une crainte adorante et seule Il nous précédait, un vaste espace étant laissé par nous entre Lui et nous. Cependant, il n’y avait aucune terreur dans la gloire qui L’entourait et brillait de Lui ; mais plutôt qu’une sainte brillance, ça semblait être la lumière même de sainteté et de paix.
“Ainsi parut-Il” nous dit Jean “quand nous Le vîmes transfiguré sur le montagne avec Elie et Moïse.”
La colline, qui n’est pas élevée, fut aussitôt foulée par ses pieds sacrés. Il se tint seul sur son sommet. Nous restâmes en arrière près du front de la colline, craignant de L’approcher, car ses vêtements brillaient alors comme le soleil, pendant que son expression était comme l’éclair. Nous voilâmes nos yeux pour Le voir. Tout était alors expectative, et un regard pour quelque puissant événement – quoi ! nous ne savions pas ! Jean s’approcha plus près de Lui et sur ses genoux, avec les mains croisées, regarda vers Lui sérieusement ; car il savait, comme il nous le dit plus tard, ce qui allait se passer, Jésus l’ayant informé la nuit précédente. La joie et cependant des larmes étaient sur sa face, alors qu’il regardait avec les yeux aveuglés, comme quelqu’un regarde le soleil de midi, son divin Maître. Ce fut, cher père, une scène impressionnante au delà de toute expression. La colline fut occupée par une foule dans l’expectative et frappée de crainte et de respect, qui ne savait pas s’il fallait rester ou fuir de la glorieuse majesté de la présence du Fils de Dieu. Le ciel bleu déployait sa concave illimitée par dessus les collines avec seulement un simple nuage. Au pied de l’éminence vers la ville sainte, s’étendaient les jardins de Gethsémané, où Jésus aimait se promener et où Il fut arrêté. Jérusalem, avec ses tours, pinacles, palais, parsemé de nouvelles croix romaines, se tenait intrépidement en vue, dans l’air transparent. Les géants cyprès qui poussaient au dessus de la tombe de Joseph, où Il avait reposé, étaient aussi visibles. Jésus sembla pendant un moment embrasser du regard ces scènes de sa souffrance, de son ignominie et sa mort, avec le regard d’un conquérant divin. Il se tourna ensuite vers ses disciples et dit :
“Vous avez été avec moi dans mes peines et vous verrez maintenant ma gloire et la récompense que mon Père me donne. Aujourd’hui, je vous quitte et monte vers mon Père et votre Père. Rappelez-vous toutes les choses que je vous ai enseignées concernant mon royaume. Allez et enseignez les joyeuses nouvelles du salut à tous les hommes et baptisez toutes les nations dans le nom du Père et du Fils et du Saint Esprit ; et voici je suis avec vous toujours, même jusqu’à la fin du monde.”[1]
Parlant ainsi, d’une voix qui fit tressaillir chaque cœur d’une émotion indescriptible, Il étendit ses mains par dessus leurs têtes et les bénit, pendant que nous tous tombions aussi à terre sur nos faces, pour recevoir ses bénédictions.
Ensuite, Il leva ses yeux vers la calme profondeur bleue du ciel et dit dans les mêmes paroles qu’Il avait prononcées la nuit de la Pâque, comme me l’avait dit Jean :
“Et maintenant, o Père, glorifie-moi auprès de Toi-même de la gloire que j’avais auprès de Toi avant que le monde fut.”
Comme Il parlait, nous levâmes nos faces de terres, pour Le voir quitter la terre, s’élevant du sommet de la colline dans les airs, dans une lente et majestueuse ascension ; ses mains étendues par dessus nous qui étions en dessous, comme s’Il répandait des bénédictions sur nous tous. Le fort éclat de surprise qui s’éleva des cinq cent voix, en Le voyant s’élever dans l’atmosphère, fut suivi par un profond et craintif silence, alors que nous Le regardions s’élever et encore s’élever, monter et encore monter dans les airs, toute sa forme devenant de plus en plus brillante, au fur et à mesure que la distance augmentait entre ses pieds et la terre.
Sur nos genoux, dans un étonnement sans parole, nous suivîmes son ascension avec nos yeux émerveillés, aucun mot n’étant dit par une âme ; aucun cœur ne pouvait avoir été entendu dans l’intense expectative du moment !
Voici ! dans les lointaines hauteurs du ciel, nous vîmes tout à coup apparaître un nuage brillant, pas plus large que la main d’un homme, mais qui à chaque instant s’étendait et devenait plus large et plus brillant. Et, rapide comme l’éclair ailé, il descendit à travers le firmament jusqu’à ce que nous le vîmes se développer lui-même en une éclatante armée des anges, qu’aucun homme ne pouvait énumérer, innombrable comme les étoiles du ciel. Pendant que ces brillantes légions descendaient, elles se répartirent en deux groupes, et passant rapidement le long des airs, rencontrèrent le Fils de Dieu montant à mi-ciel ! Le battement de leurs dizaines de milliers et dizaines de milliers d’ailes, fut entendu comme le son de plusieurs eaux. Entourant Jésus, comme un nuage brillant, ils Le reçurent au milieu d’eux, et Le cachèrent à nos yeux parmi la gloire de leur céleste splendeur !
Alors parvinrent à nos oreilles les sons de la chanson céleste, une plus sublime chorale que la terre n’a jamais entendue auparavant. Des escadrons de Séraphins et Chérubins encerclant le Fils de Dieu avec leurs ailes qui se touchaient vinrent, semblables à la musique surnaturelle qu’on entend dans les songes de la nuit, ces paroles qui s’éloignaient, pendant qu’ils s’élevaient avec le Conquérant de la mort et de l’enfer :
“Elevez vos linteaux, o vous portes !
Et élevez-vous, portes éternelles
Et le Roi de gloire entrera !”[2]
Cette chorale semblait recevoir une réponse dans le plus profond des cieux, comme si un Archange se tenait à leurs portails, veillant sur l’entrée faisant face à la terre :
“Qui est le Roi de gloire ?
L’Eternel fort et puissant, même l’Eternel puissant dans la bataille contre les principautés et les puissances.”[3]
fut chanté en retour par l’escorte montant de Jésus dans le plus sublime accent de joie triomphante.
“ Elevez vos linteaux, o vous portes !
Et élevez-vous, portes éternelles
Et le Roi de gloire entrera !”[4]
Sur ce, nous entendîmes une puissante voix, comme c’était dans le ciel, accompagnée par le son d’une trompette et des dizaines de milliers de voix autour du trône de Jéhovah semblèrent dire :
“ Dieu monte avec un cri. Il chevauche sur les cieux! Il monte sur la hauteur!
Il a emmené la captivité captive et reçu des dons pour les hommes.
O claquez vos mains, vous tous, peuples de la terre,
proclamez son triomphe, vous, armées du ciel !
“Ouvre largement tes portes, o cité de Dieu ! Elevez-vous, portes éternelles,
afin que le Roi de gloire fasse son entrée !”
Montant et toujours montant, s’éloignant et toujours s’éloignant, plus faiblement et plus faiblement, parvenaient à la terre les chorales angéliques. Et, à la fin, l’éclatant nuage des anges disparut dans le ciel élevé, le Fils de Dieu brillant au milieu d’eux comme un soleil central, entouré par un halo lumineux ; jusqu’à devenir finalement comme une étoile, ils restèrent visibles pendant quelques instants et ensuite les cieux Le reçurent hors de notre vue.
Pendant que nous étions debout à regarder les cieux lointains, espérant, attendant, cependant doutant si nus pourrions jamais Le voir de nouveau, deux brillantes étoiles semblèrent descendre des hauteurs du ciel vers nous. Dans quelques secondes, nous vîmes qu’elles étaient des anges. Descendant à l’endroit que Jésus avait quitté, ils dirent aux onze :
“Pourquoi regardez-vous au ciel, vous hommes de Galilée ? Ce même Jésus que vous avez vu monter au ciel, viendra de la même manière que vous L’avez vu monter maintenant” Ayant parlé ainsi, ils disparurent de notre vue.[5]
Le récit ci-dessus, mon cher père, de l’ascension du Christ hier dans le ciel, notre Seigneur béni Jésus, je l’ai écrit le même soir pendant que les évènements étaient présents et nets dans mon esprit. Oh, quel spectacle sublime ! Quel langage humain peut le décrire ! Mais une chose que je t’ai présentée clairement, cher père, et c’est le fait que Jésus est monté dans le ciel des cieux ! Oh, étonnante réalité ! écrasante vérité ! Qu’est-ce, oh, qu’est-ce que la terre ? Qu’est que la Judée ? Qu’est-ce qu’un homme ? – que Dieu se soucie de lui – qu’Il l’ait ainsi visité ! Et quand Il nous a visités – quand son Divin Fils, l’éclat de la gloire du Père, est descendu sur la terre, et a pris sur Lui notre nature, pour nous réconcilier avec Dieu, et obtenir une vie éternelle pour nous, comment a-t-Il été reçu ? Evité à cause de sa pauvreté volontaire – méprisé pour son humble origine humaine – haï à cause de sa sainteté – jugé devant des tribunaux pour des crimes inconnus de Lui – flagellé et craché dessus, tourné en dérision, et souffleté, et crucifié avec des voleurs, comme si ses ennemis voulaient rendre sa mort aussi ignominieuse qu’il était possible de le faire !
Mais voici l’issue ! Vois, quand Il eut payé la dette de la mort pour nous, le changement en toutes choses ! Il revint à la vie ! Il brisa la tombe ! Il sortit du sépulcre ! Les anges sont ses serviteurs ! Après quarante jours sur terre, dévoilant à ses disciples les mystères de son évangile et la splendeur de son royaume, Il monte visiblement au ciel, au milieu du jour, de Béthanie, à la vue de plusieurs centaines, et escorté par des armées d’anges, à la main droite de la Majesté en haut !
Tel est, mon cher père, l’événement approprié couronnant l’extraordinaire vie de Jésus, à la fois Seigneur et Christ ! Son ascension de cette terre au ciel de cieux, non seulement est une preuve qu’Il vint de Dieu, mais que Dieu s’est plu dans tout ce qu’Il a fait dans la chair. Si dans une quelconque chose qu’Il enseigna, Il avait dit ce qui n’était pas vrai, aussi bien concernant le Père que Lui-même, Il n’aurait pas reçu un tel accueil dans les demeures célestes ! Tout ce que Jésus a dit de Lui-même est par conséquent vrai ! Jéhovah l’atteste ! Nous devons alors croire, ou ne pouvons avoir aucun intérêt dans le royaume qu’Il est allé préparer pour nous, et dans lequel nous ne pouvons entrer que comme Il y a marché, à travers l’humiliation, la souffrance, la mort, la tombe, la résurrection et également l’ascension ! Ainsi a-t-Il dit en vérité “la manière dont je vous la connaîtrez !”
Par conséquent son royaume, mon cher père, n’est clairement pas de ce monde, comme Il le dit à Pilate, le Procurateur ; mais il est en haut. Vers lui, Il est triomphalement monté, accompagné par des légions de Chérubins et Séraphins, une ascension que David vit clairement à l’avance dans une vision quand il écrivit :
“Dieu est monté avec un cri, Il est monté en hauteur !”[6]
Alors, ne doute plus, père chéri ! Jésus, le fils de Marie dans sa nature humaine, était le Fils de Dieu dans sa nature divine ; une incompréhensible et mystérieuse union, par laquelle Il a réuni en harmonie les deux natures, séparées au loin l’une de l’autre par le péché, en un corps immaculé sur la croix. Il n’y a plus maintenant de condamnation pour ceux qui croient en Lui et L’acceptent ; car dans son corps, Il prit nos péchés et avec son sang précieux, comme celui d’un agneau sans défaut, les enleva pour toujours.
Mais, je ne peux pas écrire tout ce que je voudrais te dire, père chéri. Quand nous allons nous rencontrer, ce qui me réjouis car tu dis que ce sera le premier jour de la semaine à Jérusalem, je te dévoilerai tout ce que le Divin et Glorifié Jésus m’a enseigné. Ne doute pas qu’Il est le Messie. N’hésite pas à L’accepter, car Il est la fin de Moïse et de la loi, et des Prophètes, le véritable Schilo qui devait venir et restaurer toutes choses, à qui appartiennent la gloire, la puissance, l’autorité, la majesté, l’excellence pour toujours
Ton affectueuse fille,
Adina.
[1] Matthieu 28 :19-20
[2] Psaume 24 :7
[3] Psaume 24 :8
[4] Psaume 24 :9
[5] Actes 1 :11
[6] Psaumes 46 :6