LETTRE XXVII
Mon cher père,
Ta lettre m’a remplie d’une joie que je ne peux que misérablement exprimer par une plume. Elle fut reçue ce matin par le messager venu d’Egypte, avec le paquet, tous les deux tous les deux étant placés sans problème dans mes mains, neuf jours seulement après qu’ils aient quitté les tiennes. Je les ai embrassés et les ai pressés encore et encore sur mon cœur, à la pensée qu’ils furent si récemment touchés par tes doigts. La lettre m’assure que tu vas certainement quitter à la nouvelle lune et que, après quelques jours de retard à Gaza, tu seras avec moi peu de jours après. Cette lettre, je l’enverrai pour te trouver à Gaza.
Trois années, trois longues années, mon père chéri, se sont écoulées depuis que j’ai, pour la dernière fois, vu ta vénérable et gentille. Ah, quand tu viendras, combien je vais t’aimer et m’accrocher à toi, et observer chaque cher regard, et tendrement capter chacune de tes paroles ! C’est vrai, mon oncle Amos a été presque un père pour moi. Il est toute l’affection et la bonté ; mais aucun amour, aucune attention ne peuvent prendre la place de ceux d’un père.
Quand je passe en revue les intéressantes scènes au travers desquelles je suis passée, les merveilleux évènements que j’ai vus depuis que, pour la première fois, je suis venue à Jérusalem il y a trois ans, avec la caravane de Rabbi Ben Israël, je ne regrette pas mon longue absence loin de toi ; car avoir été à Jérusalem pendant la période que j’ai citée est un privilège qu’Abraham et tous les patriarches et prophète de Dieu auraient convoité. Pendant cette période, le Messie a marché sur la terre, revêtu de pouvoir divin, et est familièrement entré dans Jérusalem et sorti d’elle devant tous les yeux, accomplissant des miracles et faisant de puissantes œuvres que jamais une personne ne fit. J’ai appris à aimer et à honorer ce Prophète béni comme le Fils du Très-Haut et l’Oint du Seigneur ; je me suis assise à ses pieds et j’ai écouté ses enseignements célestes, et la sagesse de ses lèvres sacrées m’a rendue sage et bonne.
Mais je ne t’ai pas encore fait connaître les détails du grand miracle de puissance et d’amour par dessus tous ces merveilles qu’Il a faite, notamment la résurrection de Lazare de la mort et je vais ici te les raconter tel qu’ils se sont déroulés.
Quand Marie et Marthe, ayant vu que Lazare était abandonné par les médecins, comme ne pouvant pas se rétablir de sa grave maladie, eurent envoyé le message à Jésus, tel que je l’ai déclaré, elles commencèrent à devenir plus gaies avec le nouvel espoir naissant, en disant :
“Si notre cher Rabbi, le Saint Prophète, vient, Il le guérira avec une parole comme Il l’a fait tant de fois de la maladie.”
“Oui ; beaucoup qu’Il ne connaissait pas, Il leur a redonné la santé par un toucher” remarqua Marthe ; “combien plus Lazare, qu’Il aime comme un frère ! Oh, puisse le messager se presser à toute hâte !”
“Si Lazare mourait avant qu’Il vienne” fit remarquer de façon hésitante ma douce cousine, l’épouse de Jean le disciple, “Il pourrait le ramener de nouveau à la vie de la même manière qu’Il fit avec le fils de la veuve de Naïn.”
“Oui, sans doute, à moins que ce soit trop tard” fit remarquer Marthe, répugnant à l’idée que son frère devrait mourir ; “mais s’il est mort depuis longtemps, ce sera trop tard.”
“Rien n’est impossible avec Jésus” répondit Marie ses yeux brillants avec une foi confiante.
Ainsi, des heures passèrent entre un mélange d’espoirs et de craintes mais avant que Jésus vienne, voici ! le manteau de la mort était posé sur la face de la frère mort.
“Lazare est mort et Jésus est au loin !” fut l’amer et touchant cri poussé par les sœurs affligées, alors qu’elles pleuraient l’une dans les bras de l’autre.
Le jour suivant, l’enterrement eut lieu, comme je te l’ai décrit, cher père, dans ma dernière lettre et, cependant, aucun messager ne vint de la part de Jésus. Le matin du troisième jour, l’homme revint et dit qu’Il avait trouvé le Prophète sur le lointain rivage du Jourdain, où Jean avait baptisé, demeurant dans une humble maisonnette dans la banlieue de Bethabara avec ses disciples, occupé à enseigner les choses du royaume de Dieu, et dévoilant les prophéties à plusieurs qui avaient recours à Lui.
Le porteur de mauvaises nouvelles en provenance de deux sœurs délivra son simple et touchant message :
“Seigneur, voici celui que tu aimes est malade !”
“Et que dit-Il ? – comment apparut son expression ?” demanda Marthe à l’homme.
“Il ne montra aucune surprise mais me dit calmement ‘Fils, je le sais ! cette maladie ne sera pas à la mort. Ce sera pour la gloire de Dieu ; car par ce moyen, mon Père me permettra d’être glorifié, les hommes pourront voir et croire que je suis réellement sorti de Dieu.’ ”
“Que dit-Il encore ?” demanda Marthe, peinée et doutant.
“Rien de plus, dame ; et ayant donné mon message, je repartis” répondit l’homme.
“Hélas ! Il ne savait pas combien malade était son ami” dit Marie “ou Il n’aurait pas dit que ce n’était pas à la mort et serait sûrement dépêché avec toi.”
“Ton Seigneur devrait connaître toutes choses, fille” dit un sacrificateur qui se tenait tout près. “Cette ignorance du danger de Lazare et son affirmation qu’il ne mourrait pas montre qu’il n’est pas de Dieu. Lazare n’est-il pas mort et enterré ?”
A ceci, la foi de Marthe sembla secoué pendant un instant, mais Marie défendit avec éloquence l’ami absent de son frère, le Saint Prophète, disant que : “quand Jésus viendrait et parlerait en personne pour Lui-même, Il rendrait claire ses paroles et montrerait qu’elles ont été prononcées avec sagesse.”
Avec quelle profonde peine, elles pleurèrent leur frère ! Et leurs larmes coulèrent promptement du fait qu’elles furent assurées qu’il ne saurait pas mort si Jésus avait été là. Leur foi et leur confiance en Lui endurèrent une rude épreuve étant donné que les jours passaient l’un après l’autre et rien de plus n’était appris de Lui.
“Il nous a oubliées” répondit Marthe. “Il aurait dû être ici pour nous consoler dans notre profonde affliction, quoique Il ne vint pas pour guérir notre frère.”
“Non sœur, ne pense pas durement de l’ami béni de Lazare” dit Marie d’un ton apaisant, alors qu’elle caressait sa grande sœur. “Je sens que s’Il avait trouvé bon, Il aurait relevé notre frère, même en prononçant une parole depuis Bethabara. Il n’était pas nécessaire qu’Il l’ait vu pour le guérir ; car te rappelles-tu comment Il guérit Lucius, le fils du Centurion ? Cependant, à ce moment, Il était à un jour de distance de lui.”
“Et pourquoi, oh pourquoi n’a-t-Il pas sauvé Lazare ?” s’exclama Marthe amèrement.
“Cela, Il ne l’a pas fait, douce sœur” répondit Marie doucement “c’est pour le bien. N’a t-Il pas dit au messager que sa maladie serait pour la gloire de son pouvoir ?”
“Mais pas sa mort, Marie, pas sa mort ! Il est mort quatre jours déjà et comment la tombe peut-elle donner gloire au pouvoir de Jésus ? Va t-Il le relever alors que la corruption a commencé, qui plus est, a commencé avant que nous ne le mettions dans le froid sépulcre ? Oh, ne me parle pas du Prophète. Il n’aimait pas Lazare ou Il n’avait pas le pouvoir de le sauver. Non ; laisse-moi, Marie, à l’amertume de ma peine.”
“Ah, chère Marthe, comment ta foi en Jésus devient aussitôt nulle quand elle est éprouvée !” dit Marie, jetant sur elle, de ses yeux sombres et graves, un regard de triste reproche. “Un jour anéantira t-Il tes années d’amitié pour Lui ? Parce qu’Il n’a pas répondu à notre prière de venir à Lazare, penses-tu qu’Il ne l’aimait pas et qu’Il est indifférent à notre angoisse ? Ton reproche Lui cause du tort et Il est blessé par ton manque de confiance en son amour et son souci pour nous.
“Il peur guérir le fils d’un hautain et riche dirigeant, mais ne fait pas attention au cri du pauvre et humble” répondit Marthe avec persévérance, exprimant sans son regard l’intensité de ses sentiments.
“Ah, sœur, Dieu te pardonne et que ta peine excuse tes paroles. Quand bien même Il me tuerait, je me confierai en Lui.” s’exclama Marie posant sa main sur l’épaule de sa sœur, pendant une sainte fermeté et une lumière résolue rayonnaient dans ses yeux brillants et en larmes.
Pendant qu’elles parlaient ainsi, quelqu’un vint en courant promptement vers la maison et, essoufflé par la hâte, il leur cria ainsi qu’aux Juifs, assis là ; qui étaient venus pour les consoler au sujet de leur frère :
“Le Prophète ! Le Nazaréen ! Il arrive !“
Presque au même moment, Elec, le Gibeonite, entra et dit : “Jésus, le Messie de Dieu, est à la porte ! Il est déjà entré dans la ville, suivi par ses disciples.”
A cette nouvelle, les pleureuses qui étaient assises avec Marie et Marthe dans la porche de vigne, se levèrent pour aller Le rencontrer ; mais Marthe, criant dans une réaction de joie soudaine, bondit et, plus vite qu’elles, atteignit la rue et, courant à grande vitesse, vint où Jésus était.
Marie, qui avait reçu la nouvelle sans trahir toute autre émotion que la joie secrète et sainte d’un cœur qui avait, depuis toujours, confiance en son Seigneur, au lieur de se hâter pour Le rencontrer, s’arrachant les cheveux de peine comme sa sœur, se mit à apprêter une chambre pour l’accueil du bien-aimé Prophète quand Il entrerait, prenant ainsi la place habituelle de Marthe ; et quand elle eut tout arrangé, elle s’assit avec moi dans la maison, son cœur rempli de joie et sa face dévoilant un bonheur serein.
“Je savais qu’Il viendrait ! Je savais qu’Il ne nous laisserait ou ne nous abandonnerait pas dans notre peine, Adina” me dit-elle deux ou trois fois et alors que les bruits confus des pas avançant arrivaient à nos oreilles, son cœur battait plus vite et, avec l’éclat que la joie et l’attente produisaient pour enrichir sa face, pensai qu’elle paraissait plus belle que jamais.
Quand Marthe fut arrivée près de Jésus, qu’elle croisa entrant tout juste dans Béthanie, marchant avec quatre de ses disciples le long de la route poussiéreuse, paraissant épuisés et ayant des vêtements de voyage, elle courut et se jeta à ses pieds en pleurant :
“Seigneur, si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort !”[1]
Jésus prenant sa main, la mit debout et lui dit avec émotion, car Il semblait profondément ému par sa peine :
“Lazare dort, Marthe. Je suis venu maintenant pour le tirer de son sommeil.”
“Seigneur, si mon frère dormait simplement, il n’aurait pas été enterré. Il est mort et l’est depuis quatre jours.”
“La mort, pour ceux que mon Père aime, c’est dormir. Le bon ne meurt pas ! Lazare n’est pas mort mais il dort ; et il se lèvera de nouveau !”
“Je sais, o Rabbouni, qu’il se lèvera de nouveau à la résurrection au dernier jour.”[2]
Jésus lui dit ensuite, levant le regard vers le ciel :
“Je suis la résurrection et la vie. Celui qui croit en moi vivra quand même il serait mort ! Et quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais ! Crois-tu ceci, fille ?” [3]
“Oui, Seigneur, je crois que tu es le Christ, le Fils de Dieu, qui devait venir dans le monde. Je sais que tout ce que tu demanderas à Dieu, Dieu te l’accorderas et que même maintenant tu peux ramener Lazare de nouveau !”[4]
“La corruption et le ver ont commencé leur travail” dit un Pharisien hautain et incrédule qui était à côté, en entendant ceci “quoi que ce soit qu’ait pu être l’état de la fille du dirigeant et du fils de celle de Naïn, Lazare le scribe, au moins, est mort !”
A ce discours, Jésus ne répondit pas, mais se tournant vers Marthe, Il dit doucement :
“Je me réjouis que ta foi en moi soit revenue dans ton cœur, car tu as douté, o fille de peu de foi, du fait que je ne vins pas à ton appel. Il était nécessaire que ton frère meure, afin que je puisse manifester la puissance de Dieu en moi en le relevant. Aujourd’hui, mon Père sera glorifié et le monde saura réellement que je suis venu de Celui qui est la vie et le Donateur de la vie. Va et dis à ta sœur que je suis ici et que je voudrais qu’elle vienne parler avec moi !”
Ensuite, Marthe, ravie et s’étonnant du fait que Jésus devrait avoir connu ses pensées, également du reproche qu’Il lui a fait à propos de sa petite foi, se hâta vers sa sœur et, entrant, elle s’écria :
“J’ai vu le Seigneur ! Il t’appelle Marie. Viens et vois-Le alors qu’Il est assis à côté de la fontaine d’Essaïe près de la place du marché ; car Il a dit qu’Il n’entrera pas dans notre maison sans qu’Il franchisse son seuil avec Lazare à ses côtés.”
Ses paroles firent bondir mon cœur avec un indescriptible frisson. Lazare venir encore dans la maison en vie marchant avec Jésus ! Je cachai ma face dans mes mains, gagnée par une idée si pleine de joie, de terreur, d’étonnement et de crainte surnaturelle. Marie se leva rapidement et sortit, se supportant à peine sur ses membres défaillants, à cause joie tremblante et d’une douce, indéfinie espérance d’un incommensurable et intenable bonheur sur le point de lui arriver et qu’elle ne savait pas.
Certains de ses amies Juives de Jérusalem la rencontrèrent a ce moment à la porte, ne sachant pas que Jésus était entré dans Béthanie ; elles commencèrent à la consoler et à lui demander si elles iraient aussi avec elle pour pleurer à la tombe de Lazare ; car elles se dirent l’une à l’autre :
“Elle va à la tombe pour y pleurer !”[5]
“Elle va voir Jésus, l’ami de Lazare, car Il l’appelle” répondit Marthe, souriant avec vivacité et parlant avec une animation qui présentait un singulier contraste avec sa récente profonde peine.
Marie se hâta où Jésus était assis près de la fontaine, lavant ses pieds poussiéreux et blessés et parlant à ceux qui étaient autour de Lui de la résurrection du mort. Ayant vu Marie, Il étendit sa main, mais elle tomba à ses pieds, en larmes !
“Seigneur” dit-elle dans les mêmes propos que sa sœur et avec une profonde émotion “si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort.”[6]
Alors, inclinant sa tête au bord du bassin de marbre, elle pleura abondamment. Les Juifs, hommes et femmes, qui se tenaient tout autour, étant touchés par sa peine, pleurèrent aussi pendant que de brûlantes larmes coulaient sur la face du bien-aimé Jean, son disciple, qui se tenait à côté.
Jésus soupira profondément et frémir en esprit au moment où Il vit sa peine et leurs pleurs avec elle. Son expression sacrée fut défaite par la douleur de son âme.
“Levez-vous, allons à la tombe où il est couché !” leur dit-Il “où l’avez-vous mis ?”[7]
“Viens, cher Seigneur, et vois” répondit Marie, Le tenant avec révérence par la manche de sa robe.[8]
Et doucement mais avec empressement, elle Le conduisit vers le lieu des tombes dans la vallée des Oliviers.
Pendant ce temps à la maison, Marthe, avec soin et une étrange joie, était en train d’apprêter la chambre de Lazare. Elle pleurait pendant qu’elle la dépoussiérait. Ensuite, elle la garnit de fleurs fraîches qu’elle cueillit dans le petit jardin.
“Ceci est la rose qu’il arrangeait et aimait. Ceci est la violette qui s’épanoui, immortelle. Je vais la placer sur son oreiller” dit-elle avec une joyeuse hilarité, attendrie par le plus beau regard de paix ; pendant que l’espoir brillait dans ses yeux comme deux étoiles jumelles du matin introduisant un glorieux jour.
Elle parlait à peine par dessus son souffle et se déplaçait sur la pointe de ses pieds.
“Pour qui est ce préparatif, Marthe chérie ? Pour Jésus ?” demandai-je.
“Oh, non ! La chambre du Saint Prophète est prête. Marie l’a préparée. Celle-ci est la chambre de Lazare et je la décore pour lui !”
“Crois-tu réellement qu’il reviendra de la mort ?” demandai-je entre le doute et une étrange crainte.
“Croire ! oh, oui. Je sais que rien n’est impossible avec Lui ! Je ne doute plus. Ma foi ne vacille plus. Il ressuscitera mon frère et aujourd’hui il s’assiéra à notre table avec nous de nouveau, et cette nuit il reposera sa tête dans un sommeil pacifique sur cet oreiller que je parsème de ses fleurs favorites. Jamais une maison n’a eu deux tels hôtes comme nous aurons aujourd’hui – le Messie de Dieu et quelqu’un qui est revenu de la mort !”
A ce moment, nous entendîmes le bruit de la foule qui passait à côté. Nous ayant été dit que Jésus se rendait à la tombe, Marthe, m’embrassant avec un sourire céleste, m’entraîna doucement après elle pour suivre le béni Prophète à la tombe. Toute Béthanie fut derrière ses pas. L’étonnement et une ardente attente étaient sur chaque face. Il n’y avaient ni clameur, ni tumulte dans la vaste multitude, mais plutôt un faible murmure de crainte et de curiosité.
Comment décrirai-je Jésus, comme Il apparut alors ! Il portait une robe bleue tissée sans couture partout, le travail affectueux et cadeau des sœurs. Sa face était pâle et triste ; cependant, une certaine majesté divine était pâle sur elle de sorte que son calme, haut front semblait comme si ce fut un trône ! Ses yeux saints, graves étaient remplis de peine. Sa bouche comprimée trahissait l’effort qu’Il faisait pour réprimer l’émotion de la peine profonde de son cœur.
Il avançait lentement et, entrant dans le cimetière, Il se tint aussitôt devant la tombe de son bien-aimé ami.
Pendant quelques instant, Il se tint fixant la porte de pierre close de la cave de la cave plongée dans le silence. Il régnait un silence d’attente parmi la vaste foule. Marie s’agenouilla à ses pieds, fixant son regard sur sa mine avec une sublime expression d’espoir et de confiance. Marthe s’approcha doucement et tomba sur ses genoux à côtés de sa sœur. Jésus les regarda tendrement et, posant ses yeux sur la tombe, Il pleura. De larges et brillantes larmes coulèrent sur ses joues et parcoururent sa barbe tombante, jusqu’à terre. Je m’agenouilla à côté des sœurs.
“Voyez combien Il l’aimait !” chuchotèrent, avec surprise, les Juifs présents.[9]
D’autres dirent :
“Cet homme qui a ouvert les yeux de l’aveugle, ne pouvait-il pas faire aussi que cet homme ne mourut point ?”[10]
Jésus, soupirant profondément, vint alors plus près de la tombe. C’était, comme je l’ai dit avant, une cave et une pierre était placée devant. D’un petit mouvement de sa main droite à ceux qui se tenaient à côté, Il dit d’un ton qui, quoique bas, fut entendu par tout le monde, tellement solennel était le calme environnant :
“Otez la pierre !”[11]
“Seigneur” dit Marthe “par ce temps, le corps sent déjà, car il mort depuis quatre jours.”[12]
“Fille” dit Jésus, la regardant “ne t’ai-je pas dit, il y a peu de temps, que si tu crois que je peux ressusciter ton frère, tu le verras vivant de nouveau ? Crois et tu verras la puissance de Dieu.”[13]
Alors, les hommes, avec quelques difficulté, ôtèrent la pierre de l’entrée du sépulcre et la posèrent sur un côté. La cave sombre s’ouvrit avec une ténébreuse horreur et l’air qui en sortit était si corrompu que tous, sauf Jésus et Marie, reculèrent, se retirant de plusieurs pas de l’entrée. Jésus se tint regardant la cave où, comme nos yeux devinrent accoutumés à l’obscurité qui était à l’intérieur, nous pouvions discerner le corps de Lazare, couvert d’un linge par le manteau tombal, et sa face enveloppée d’un linge qui était décoloré par l’humidité sépulcrale de la tombe.
Levant les mains vers le ciel et levant ses yeux spirituels, qui étaient encore mouillés par les larmes, Jésus parla d’une voix d’un indescriptible pathétique, d’une gravité d’appel et d’une manière de la plus infinie révérence, comme suit :
“Père, je te remercie du fait que tu m’as entendu. Et je sais que tu m’entends toujours ; mais à cause des gens qui se tienne à côté, je t’offre cette prière, afin qu’ils puissent croire que le pouvoir que j’ai vient de toi, et qu’ils puissent croire que tu m’as envoyé. Et maintenant, o Père Saint, puisse-je te glorifier sur la terre avec le pouvoir que tu m’as donné !”[14]
Il se tourna alors vers la tombe et, étendant sa main, Il cria s’une voix forte qui fit trembler chaque cœur :
“Lazare, sors !”[15]
Mon s’arrêta dans mes veines. Osant à peine regarder, je jetai un coup d’œil et vis ce que tous les yeux virent aussi, le corps se lever et se tenir debout à l’intérieur de la cave, se tourner avec sa face vers nous et venir, mains et pieds enveloppés dans les vêtements de tombe et sa face enveloppée d’un linge. Sa mine était comme le marbre par la blancheur et ses yeux, qui étaient ouverts, rayonnaient surnaturellement.
En le voyant, un cri simultané, perçant, jaillit des lèvres des gens et il y eut un terrifiant recul ce tous ceux qui étaient près de la cave.
Marthe, criant avec extravagance le nom de son frère, tomba sur sa face, inanimée.
“Déliez-le et laissez-le aller libre !” dit Jésus calmement, s’adressant aux hommes pétrifiés et étonnés qui avaient ôté la pierre.[16]
Marie fut la première qui eut le courage de l’approcher et, au moment où elle commença à enlever le linge des côtés de sa face, les autres, prenant courage sur son exemple, se hâtèrent pour dénuder ses mains et ses pieds. Dans un petit moment, il fut libre de ses habits extérieurs de tombe et la coloration normale de ses joues revenant à lui, ses lèvres rougirent brillamment, ses yeux parurent naturels, rayonnant d’étonnement et d’amour alors qu’il regardait autour de lui. Apercevant Jésus, il fut sur le point de se jeter à ses pieds en reconnaissance (car il semblait avoir conscience de tout ce qui était arrivé) mais le Puissant Prophète l’attira à Lui et l’embrassa. Marie, sortant d’abord de la crainte, se jeta alors, aveuglée par les larmes de joie, dans les bras de son frère. Marthe fut relevée par lui à sa respiration virile, sa voix aimée soufflant tendrement dans son oreille la rappela à la conscience de son bonheur.
Mais ma plume refuse de trouver le langage pour t’exprimer l’émotion inexprimable de joie et de gratitude, les paroles d’amour et de louanges qui remplirent tous les cœurs. Lazare, le nouveau-né mort, s’épanouissant dans les riches teintes d’une parfaite santé, marcha vers la maison aux côtés de Jésus, pendant que les sœurs étaient accrochées à lui avec une profonde reconnaissance, les cœurs débordant de joie. Puis le grand Prophète, puis Lazare, et puis Jésus de nouveau reçurent les applaudissements de la vaste multitude de gens ! Les hymnes furent chantés à Jéhovah alors que nous passions dans les rues et tellement de gens tombèrent pour adorer Jésus que ce fut long avant que nous franchissions le seuil de la demeure, ce que fit réellement Jésus, avec Lazare à ses côtés ! Et Marthe vit son frère assis à la table et cette nuit sa tête reposa dans un profond sommeil sur l’oreiller parsemé de fleurs que sa foi et son amour avaient préparé pour lui.
Ainsi, mon cher père, je t’ai-je donné le récit des détails de ce puissant miracle, dont le rapport a rempli tout Jérusalem d’étonnement et doit conduire les sacrificateurs azinsi que les gens à reconnaître Jésus comme le Messie de Dieu, Celui au sujet duquel Moïse et les Prophètes ont écrit. Doutes-tu toujours, mon cher père ?
Cette lettre te trouvera à Gaza. Avec l’espoir de t’embrasser bientôt, je demeure comme toujours, Ton affectueuse fille,
Adina.
[1] Jean 11 :21
[2] Jean 11 :24
[3] Jean 11 :25,26
[4] Jean 11 :22,27
[5] Jean 11 :31
[6] Jean 11 :32
[7] Jean 11 :34
[8] Jean 11 :34
[9] Jean 11 :36
[10] Jean 11 :37
[11] Jean 11 :39
[12] Jean 11 :39
[13] Jean 11 :40
[14] Jean 11 :41,42
[15] Jean 11 :43
[16] Jean 11 :44