Le Prince de la Maison de David- Lettre 8

 

Lettre VIII

Mon cher père,

La très gentille façon dont tu as reçu ma communication concernant l’extraordinaire prophète qui, maintenant, attire après lui tout Juda dans le désert et l’assurance que je peux obtenir de ta sagesse, de ton savoir et de ta piété, une solution à toutes les difficultés et un vrai guide à la vérité me poussent à continuer librement et en détail le récit des événements qui se sont passés sous mon expérience. Je vais, en racontant ces merveilleux événements que j’ai vus et vais voir, non seulement t’exprimer les impressions qu’ils ont sur moi, mais sur les autres, parmi les sages, les érudits et les grands qui ont également entendu et vu ces choses. Ainsi tu auras le poids de plusieurs témoignages que, sans doute, tu tiendras en respect proportionnellement à la dignité, à la sagesse et au rang des personnes.

Ma dernière lettre se termina avec le récit sur l’escorte romaine sous l’autorité du jeune Centurion romain qui, comme je te l’ai écrit avant, accorda avec beaucoup de courtoisie sa protection à notre petit groupe. Il faisait tôt, le soleil s’étant levé moins d’une heure et demie au dessus des montagnes de Moab. L’air était de cette élasticité légère si agréable à respirer et qui me frappa comme une de ces particulières bénédictions de cette terre sainte de nos pères. En Egypte, il y a un manque de vie dans l’air torride de cette saison que nous n’éprouvons pas ici. Et alors que j’avançais, je sentis comme si je monterais joyeusement le Mont Arabe du désert et volerais à travers les mers sablonneuses d’Edom avec l’agilité qui m’étonne chaque fois que je vois les fils du désert galoper. Car un groupe de trente vint audacieusement près de nous par une gorge au moment où nous approchions de Béthanie. Et après nous avoir observés un petit instant, ils s’enfuirent au loin, comme le vent, dans le recoin des collines, un détachement de douze soldats de notre escorte romaine ayant reçu l’ordre d’aller vers eux. Sur ce Rabbi Amos dit que nous étions chanceux d’avoir une telle forte protection. Autrement, ce groupe des fils d’Esaü nous aurait attaqués et pillés, comme ils ont l’habitude de le faire à chaque groupe des Israélites sur lequel ils tombent. Et la récente affluence d’un si grand nombre des gens au Jourdain les a attirés, avec une grande agilité près des murs de Jérusalem, en grand nombre dit le Centurion romain, pour les attendre et leur voler. Ainsi l’hostilité qui commença entre le patriarche Jacob et le patriarche Esaü, n’a jamais été guéri mais reste dans les cœurs des descendants même jusqu’à ce jour ; et encore « Esaü hait Jacob à cause des bénédictions dont son père le bénit. » Les Romains admirèrent beaucoup le talent d’écuyers de ces fils d’Esaü ; et sur leurs lourds chevaux, avec leurs armes en fer, il aurait été vain de les suivre dans leur retraite.

Nous atteignîmes, aussitôt après, le sommet de la montagne au dessus de Béthanie, éminence de laquelle, avant de descendre au village, nous eûmes une splendide vue de la Sainte Cité de Dieu avec son Temple élevé brillant sous les rayons du soleil comme une montagne d’argent architectural. La tour d’Antonio contrastait sombrement avec sa splendeur et la citadelle de David s’élevait par-dessus les murs avec une majesté guerrière qui m’impressionna profondément. Ah! Comment pouvais-je fixer la scène sans émotion d’admiration, d’étonnement, d’adoration et de gratitude! Je m’arrêtai et suppliai Rabbi Amos de retarder quelques instants pendant que j’embrassais du regard Jérusalem qui, comme elle doit lui être familière à partir de ce point ainsi qu’à tout le reste de notre cavalcade, était nouvelle pour moi. Mais il était trop loin en avant pour m’entendre car je m’étais déjà attardée pendant quelques secondes. Et le Centurion, galopant jusqu’à mes côtés, s’arrêta respectueusement avec une partie de sa troupe et dit qu’il attendrait mon loisir. Je ne pouvais que le remercier pour sa courtoisie. Et puis tournant vers la ville, je fus aussitôt perdue à toute autre chose sauf la contemplation de cela. Irrésistiblement, alors que je regardais, en mémoire je retournai en arrière au temps où notre père Abraham rencontra devant ses portes Melchisédech, son Roi et reçut de lui un hommage royal. Je vis aussi David venant de ses hauts portails à la tête des armées, pour conquérir les nations voisines. Je vis les splendides cortèges des monarques orientaux, des rois du sud, et des rois du nord, et de Saba, la reine de la joyeuse Arabie, se déplaçant à travers ses plaisantes vallées, et entrant pour se prosterner devant Salomon, le prince de sagesse, gloire et puissance, la célébrité dont la sagesse et la grandeur remplissaient toute la terre.

Hélas! Toute la terre est maintenant remplie de l’histoire de la honte et de l’esclavage d’Israël. Mais le jour vient, cher père, où elle relèvera sa face de la poussière et mettra les vêtements royaux, et Dieu placera une couronne sur sa tête, et sa gloire et son autorité seront sans fin. Cette certitude sécha les larmes qui me montaient aux yeux alors que je faisais contraster le présent avec le passé. En mémoire, alors que je continuais à regarder, je vis les armées des Assyriens, et les armées des Chaldéens, les armées d’Egypte, et de Perse, et de Grèce, toutes, chacune à son tour, assaillant la ville sainte, et même la conquérant quoique Dieu y demeura, dans le mystérieux feu de la Shekinah. Mais la présence de Jéhovah dans une ville ou dans un cœur, ne pourra pas le protéger contre ses ennemis, si la ville ou le cœur ne sont pas avec Dieu ; et nous savons par les prophètes que les cœurs de nos pères étaient loin de Dieu ; et par conséquent ils furent livrés à leurs ennemis pour être flagellés. Oh, mon cher père, que notre peuple d’aujourd’hui n’apprendrait-il la terrible leçon que lui enseigne le passé!

« Tu devrais voir Rome » dit le Centurion qui avait noté mon émotion évidente avec surprise. « C’est une ville d’une grandeur inégalée. Elle couvre six fois plus d’espace que cette ville, et contient trois cent soixante cinq temples, pendant que Jérusalem n’en contient qu’un! »

« Il n’y a qu’un seul Dieu » répondis-je de façon impressionnante.

« Nous croyons qu’il y a un Dieu, qui est l’auteur d’une grande multitude de petits dieux et à chacun nous érigeons un temple » dit-il fermement, cependant avec respect. Sur ce, émue de compassion du fait que quelqu’un de si noble en esprit et en personnalité soit ignorant de la vérité, je commençai à lui montrer par les prophètes que Dieu était unique et que toute chose était faite par Lui.

Mais, cueillant une fleur d’un arbre qui était à portée de la main, il dit : « C’est en dessous de la dignité du Père des dieux, le grand Jupiter, de descendre pour faire une fleur comme celle-ci ou former un cristal, ou colorer le rubis, ou créer ce colibri à la teinture dorée qui voltige parmi ces fleurs odoriférantes. Il fit le soleil, et la lune, et les étoiles et la terre, mais laissa les bas travaux aux déités inférieures. Parle-moi de ton Dieu unique, et prouve-moi, jeune fille, qu’Il fit toutes choses, et qu’Il est unique, et ton Dieu sera mon Dieu. »

Il n’y avait pas de temps pour essayer de combattre cette erreur, mais je me suis réservé la première occasion favorable pour l’instruire dans la vérité telle qu’elle est révélée du Ciel à notre estimé peuple. Il a déjà manifesté un esprit curieux dans notre sainte foi, et Rabbi Amos lui a enseigné plusieurs choses des livres de Moïse, suffisantes uniquement pour l’amener à désirer connaître plus, mais pas pour éradiquer de son cœur ses superstitions païennes. La douceur de sa nature, son jugement sain, la franchise de son caractère, l’ingénieux tempérament de tout l’homme, m’inspirent avec grande confiance que finalement il sera convaincu de ses erreurs et qu’il embrassera la foi d’Israël.

Nous passâmes ensuite à travers les rues de Béthanie et arrivâmes à la maison de ton ami d’autrefois, Rabbi Abel, qui mourut il y a plusieurs années à Alexandrie, quand il alla avec des marchandises, et dont tu me demandas de m’enquérir du bien-être des enfants. Comme tu le sais, ils ont atteint l’âge adulte et demeurent encore à Béthanie. Etant amis de ma cousine Marie, il fut décidé que nous nous arrêtions là pour nous reposer une demi-heure avant de continuer notre chemin. Ce fut devant une demeure simple et humble que Rabbi Amos m’aida à descendre ; et il y avait un air de propreté et de douce paix domestique à son sujet qui apparut tout de suite à mon esprit et me fit aimer l’endroit avant même que j’aie vu les occupants, lesquels sortirent pour recevoir ma cousine Marie et rentrer avec elle; mais apprenant également mon arrivée, il sortit une belle jeune fille de vingt deux ans, avec la plus aimable expression d’une affectueuse bienvenue ; et approchant de moi avec à la fois respect et amour elle m’embrassa, pendant que Rabbi Amos nous présentait l’une à l’autre. Je sentis immédiatement comme si j’étais dans les bras d’une sœur et que je l’aimerai toujours.

Ensuite vint un jeune homme d’environ trente ans, avec la mine d’une expression extrêmement intéressante, plein d’intelligence et de bonne volonté. Il était pâle et habituellement pensif, mais une fine lumière amicale brilla dans ses yeux sombres et beaux au moment où il tendit sa main pour m’accueillir. Tu as déjà eu une pleine description de lui et de son caractère dans mes premières lettres et tu n’as donc pas besoin qu’on te dise qu’il s’agissait de Lazare, le fils de ton ami. Marthe, la sœur aînée, me rencontra à l’entrée mais avec plus de cérémonie et s’excusa de recevoir dans une humble demeure la riche héritière d’Alexandrie, ainsi me désigna-t-elle, mais je l’embrassai si affectueusement que ce sentiment d’en alla instantanément. Je fus très touchée par cette famille entière. Chacun de ses membres possédait une attraction d’un genre particulier. Et dans tous les trois il me semblait avoir trouvé deux sœurs et un frère. Marthe s’occupa tout de suite à nous préparer des rafraîchissements et posa aussitôt devant nous un repas frugal mais agréable ; plus que nous n’en désirions car nous insistâmes tous que nous n’avions besoin de rien, étant donné que nous n’avions pas été longtemps en selle. En attendant, Marie et Lazare s’assirent chacun à mes côtés et me posèrent beaucoup de questions sur Alexandrie, et particulièrement si j’avais déjà vu la tombe de leur père. Et quand je leur dis qu’à la demande de mon père, j’avais maintenu les fleurs en bon état autour d’elle, ils pressèrent tous les deux mes mains et me remercièrent avec tellement de reconnaissance que les larmes dans mes yeux répondirent à leur émotion.

Comment pourrai-je te décrire le charme de la personne de Marie, et encore la perfection des traits comme de l’âme qui les anime et leur confère un charme que je ne peux pas adéquatement t’exprimer. Les yeux sont de cette remarquable couleur, si rarement vue parmi notre peuple, qui est, quand c’est le cas, d’un ton bleu plus profond et plus riche que ce qui est trouvé chez les natifs aux yeux azur du nord. Ils sont aussi bleus que les cieux de Judée et cependant possèdent toute la splendeur, semblable aux étoiles, et torride des yeux des jeunes filles hébreux. Ses cheveux, qui sont doux, de couleur brune dorée, sont portés en masses onduleuses autour de son cou superbement modelé. Son air est serein et confiant et elle si peu habile qu’elle te laisse lire tous les secrets de son âme pure dans le ciel estival de ses doux yeux dont j’ai parlé. Il y a une indescriptible considération à son sujet qui est très touchante et en même temps plaisante.

Marthe, l’aînée, est d’une disposition plus vivante, cependant plus autoritaire dans son aspect, étant grande et presque royale dans ses manières. Ses yeux et ses cheveux sont d’un noir intense ; les premiers sont doux et brillants d’intelligence comme ceux de son frère Lazare à qui elle ressemble. Elle a une voix charmante et une manière qui te conduit à sentir une grande confiance dans son amitié. Elle semblait prendre sur elle toute la direction de notre réception, que la calme Marie lui laissa comme si ce fut un fait normal, préférant plutôt parler avec moi concernant le pays d’Egypte, où nos pères furent si longtemps en esclavage et au sujet duquel tous nos jeunes gens en Judée ont de très mauvaises idées. Marie me demanda si je n’avais pas peur d’y habiter ; si j’avais déjà vu les tombes des pharaons ; et si les soixante dix pyramides du Nil furent le travail de nos pères ou si elles avaient résisté au déluge comme les collines éternelles. Lazare conversa principalement avec Rabbi Amos, qui le questionna avec beaucoup d’intérêt sur le prophète Jean du désert à qui, tu te rappelleras que je t’écrivis, Lazare avait rendu visite.

Après notre repas, Marthe me montra trois rubans de broderie qu’elle était en train de confectionner pour le nouveau voile du Temple, à installer l’année prochaine ; car les sœurs vivent en faisant de la couture pour le Temple, et Lazare fait des copies de la Loi et des Psaumes pour les prêtres. Il me montra sa table de copie et les rouleaux de parchemin qui étaient dessus, certains partiellement inscrits en beaux caractères, certains tout à fait complets. Il me montra aussi une copie du Livre d’Esaïe, qu’il avait finie et qui l’avait occupé pendant cent et sept jours. Elle était délicatement exécutée. Une autre copie incomplète était jetée à côté et était destinée à être brûlée, parce qu’il avait une erreur en formant une lettre. Car si un iota de trop est ajouté, le travail est condamné par les prêtres et brûlé. Ils sont si stricts qu’il ne doit exister que de parfaites et impeccables copies de la loi, et rien d’autre.

Marie aussi me montra un tapis superbement brodé que la femme de Pilate, quand elle avait été dernièrement en Césarée, commanda pour elle.

« Je ne recevrai pas d’argent pour ça » dit Marie « mais le lui offrirai car elle a déjà été gentille avec nous et quand, l’année dernière, elle et le Procurateur Pilate, son seigneur, arrivèrent de Césarée à Jérusalem, à la période de la Pâque, elle envoya son propre médecin de famille afin de soigner Lazare qui était tombé malade pour s’être confiné dans ses tâches. Elle nous connut uniquement en se renseignant sur la personne qui avait fait la broderie des capes de l’autel, qu’elle avait vues quelque part et beaucoup admirées avant qu’elles ne soient placées dans le Temple. »

Voyant sur la table une couverture de livre en soie et velours richement travaillée, portant les initiales « I N » avec une broderie de feuilles d’olive dessus, je demandai si, étant si élégante, elle n’était pas pour le Souverain Sacrificateur.

« Non » répondit Marthe, avec des yeux brillants, parlant avant que sa sœur n’ait répondu « c’est pour notre ami, et ami et frère de Lazare. »

« Quel est son nom? » demandai-je.

« Jésus de Nazareth. »

« J’ai entendu Jean parler de cette personne » dit ma cousine Marie avec animation, et m’appelant elle me rappela comment Jean avait répété ce que Lazare lui avait dit sur son ami de Nazareth, au sujet duquel je t’écrivis.
« Je serai contente » ajouta ma cousine « de le connaître aussi. »

« Et me référant à ce que j’ai entendu sur lui » dis-je « ce serait vraiment un plaisir de le voir. »

Les deux sœurs nous écoutèrent avec un intérêt visible et Marthe dit :
« Si vous aviez été ici il y a quelques jours, vous l’auriez vu. Il nous a quittés après avoir été avec nous pendant trois semaines, pour retourner à Nazareth. Mais il a demandé à rencontrer Lazare à Bethabara dans trois jours pour quelque raison importante. Et mon frère ira car il l’aime tellement qu’il traverserait les mers pour le rencontrer. »

« Alors » dit Rabbi Amos à Lazare « si tu dois voyager bientôt vers le Jourdain pour rencontrer ton ami, tu ferais mieux de te joindre à notre groupe et de partager notre escorte. » A ceci Lazare, après consultation de ses sœurs, consentit.

Quelle heureuse famille est-ce, pensai-je. Les sœurs heureuses dans l’amour de l’une envers l’autre, le frère heureux dans le leur, tous les trois unis comme un dans la plus pure affection, pendant qu’un quatrième est ajouté au cercle, dont l’amour pour les trois est égal au leur pour lui! De rang social humble, pauvres et dépendant du travail de leurs mains pour leur pain quotidien, cependant leur famille est celle que les rois devraient envier et que ni l’or ni les perles ne pourraient acheter.

Je quittai cette demeure bénie d’amitié fraternelle avec regret et sentis que je serais parfaitement heureuse si je pouvais être admise comme un cinquième maillon dans la couronne de leur amour mutuel. Même le Centurion romain fut frappé par l’atmosphère de pacifique repos qui y régnait et m’en parla avec enthousiasme, pendant que nous chevauchions ailleurs.

Aux environs de midi, nous nous arrêtâmes à un caravansérail, à mi-chemin entre Jéricho et Béthanie. Là, nous rejoignîmes un ami de Rabbi Amos, le vénérable, érudit et homme de loi, Gamaliel. Lui aussi, il le confessa, se rendait au Jourdain pour avoir un entretien avec le prophète, étant poussé à le rechercher suite à un extraordinaire songe qu’il eut et qu’il répéta à son ami Rabbi Amos, loin de nos oreilles. Mais l’effet sur mon oncle excita une bonne part de ma curiosité pour savoir ce que c’était mais il fut studieusement silencieux sur ce sujet. Accompagnant l’homme de la loi, il y avait un jeune homme, qui était son disciple et qui allait avec lui comme un compagnon de route. Son nom est Saul. Et je le remarquai particulièrement car je surpris le vénérable homme de la loi dire qu’il était le plus remarquable jeune homme qui se soit jamais assis à ses pieds pour apprendre les mystères de la Loi. Ce jeune disciple de la Loi et Lazare chevauchèrent ensemble et parlèrent longuement et sérieusement le long du chemin, le premier pensant que rien, sinon le mal, ne viendrait de la prédication du nouveau prophète, pendant que le dernier, chaleureusement, le défendait ainsi que sa mission comme étant divins. Le Centurion romain suivait leur conversation avec la plus particulière attention, car Saul était instruit dans les Prophètes et puisait richement dans ses réserves pour prouver que le vrai Messie ne pouvait pas être annoncé par un si médiocre messager comme ce prédicateur de la repentance dans le désert. Saul dressa avec éloquence un splendide tableau de la venue du Messie et de la splendeur de son règne. Il ajouta que les anges et des signes célestes, et non un homme sauvage du désert avec le baptême d’eau, devraient préparer le chemin devant Lui.

A la fin, comme le jour s’achevait, nous vînmes en vue des murs et tours de Jéricho ; mais nous ne réussîmes à atteindre les portes qu’après qu’elles aient été fermées. La présence du jeune Centurion les fit rouvrir immédiatement et nous fûmes admis avec quelques centaines de personnes qui, ayant atteint la porte après sa fermeture, supplièrent alors et obtinrent la permission d’entrer en notre compagnie.

Le jour suivant nous continuâmes jusqu’à Guilgal seuls, la route étant parfaitement sûre et le courtois Romain étant sorti en hâte, tôt le même jour, pour poursuivre le fameux Barabbas qui avait, la nuit d’avant, attaqué une caravane à moins de quatre lieues du Jourdain et pris un grand butin et tué beaucoup de gens.

« Maintenant, je t’écris sous le toit de la résidence de campagne de Rabbi Amos. Demain tôt » dit un passage que je recopie de mon journal écrit là « nous irons à Bethabara, un petit village au-delà du Jourdain mais situé sur ses rives, près duquel nous apprenons que Jean baptise maintenant. Il n’est plus au gué du Jourdain où le fiancé de ma cousine Marie, Jean, le trouva et fut baptisé par lui il y a quelques semaines. Lazare est parti avec Saul et l’érudit Gamaliel, avec plusieurs hommes de la Loi et docteurs, qui désirent voir et entendre ce prophète du désert. »

Réellement, cher père, la venue d’un prophète est un événement si rare parmi nous que seule l’idée que Jean le Baptiste peut être un vrai prophète de Dieu, a ému le grand cœur d’Israël et excité la curiosité, l’espérance et émerveillé au plus haut degré jamais connu dans le pays. Il semble qu’il n’y ait qu’un sujet et une pensée. Chacun dit à son voisin ; « as-tu vu ou entendu le nouveau prophète? Est-il le Messie, ou Elie? »

Ma prochaine lettre te donnera un récit, mon cher père, de ce que j’ai vu à Bethabara et va, peut-être, plus profondément t’intéresser que tout ce que je t’ai déjà écrit.

Que l’espérance d’Israël ne peut être longtemps ajournée et que nous pouvons recevoir le Messie, quand Il vient, dans une foi humble, dans l’honneur et dans l’amour est la prière de

Ton affectueuse fille,
Adina